AEI-DEVOIR-DE-MEMOIRE-PANNEAU

Devoir de mémoire

Définition : Obligation morale de témoigner, individuellement ou collectivement, d’événements dont la connaissance et la transmission sont jugées nécessaires pour tirer les leçons du passé ( la résistance ou la déportation pendant la Seconde Guerre mondiale par exemple). Petit Larousse

Victor Ullmann, Sonate n° 7 –
V. Thème, variations et fugue sur un chant populaire hébraïque

L’oubli : le triomphe définitif de l’ennemi

« L’oubli serait une injustice absolue au même titre qu’Auschwitz fut le crime absolu. L’oubli serait le triomphe définitif de l’ennemi. C’est que l’ennemi tue deux fois, la seconde fois en essayant d’effacer les traces de son crime. »
Elie Wiesel, J.-C. Raspiengeas, La mémoire de l’Holocauste Télérama, Numéro 1954, 24 juin 1987

Se souvenir, se recueillir

« Il reste une seule ressource : se souvenir, se recueillir. Là où on ne peut rien « faire », on peut du moins ressentir, inépuisablement. C’est sans doute ce que les brillants avocats de la prescription appelleront notre ressentiment, notre impuissance à liquider le passé. Au fait, ce passé fut-il jamais pour eux un présent ? Le sentiment que nous éprouvons ne s’appelle pas rancune, mais horreur : horreur insurmontable de ce qui est arrivé, horreur des fanatiques qui ont perpétré cette chose, des amorphes qui l’ont acceptée, et des indifférents qui l’ont déjà oubliée. Le voilà notre « ressentiment ». Car le « ressentiment » peut être aussi le sentiment renouvelé et intensément vécu de la chose inexpiable ; il proteste contre une amnistie morale qui n’est plus qu’une honteuse amnésie ; il entretient la flamme sacrée de l’inquiétude et de la fidélité aux choses invisibles. L’oubli serait ici une grave insulte à ceux qui sont morts dans les camps, et dont la cendre est mêlée pour toujours à la terre ; ce serait un manque de sérieux et de dignité, une honteuse frivolité. Oui, le souvenir de ce qui est arrivé est en nous indélébile, indélébile comme le tatouage que les rescapés des camps portent encore sur le bras. Chaque printemps les arbres fleurissent à Auschwitz, comme partout ; car l’herbe n’est pas dégoûtée de pousser dans ces campagnes maudites ; le printemps ne distingue pas entre nos jardins et ces lieux d’inexprimable misère. Aujourd’hui, quand les sophistes nous recommandent l’oubli, nous marquerons fortement notre muette et impuissante horreur devant les chiens de la haine ; nous penserons fortement à l’agonie des déportés sans sépulture et des petits enfants qui ne sont pas revenus. Car cette agonie durera jusqu’à la fin du monde. »
Vladimir Jankélévitch, L’imprescriptible, Seuil, 1986

Le détour de l’œuvre d’art

« Comment raconter à ses enfants, à table – on est là, on est bien – et on va vous gâcher le reste du repas en vous racontant que votre papa a été un enfant traqué ou qu’il a failli mourir, qu’il a été condamné à mort. À l’âge de 6 ans j’ai été condamné à mort, est-ce que je pouvais le raconter à mes enfants quand ils avaient 6 ans ? Ils auraient aussitôt pensé mais donc on risque de mourir nous aussi puisqu’on a 6 ans. C’est le processus d’identification. Donc c’est une situation qu’on appelle « situation de double contrainte ». C’est-à-dire que si je parle, je traumatise mes enfants, et si je ne parle pas, je les angoisse. Pas facile, sauf s’il y a le détour du tiers, c’est à dire le détour de l’œuvre d’art, du film, du roman, de la pièce de théâtre, du débat politique, philosophique, psychologique. »
Transcription du témoignage de Boris Cyrulnik, Des mots pour comprendre, 2011

Chistian Boltanski, Photo : les habitants de l’hôtel de Saint Aignan en 1939  © Musée d'art et d'histoire du Judaïsme / photo Christophe Fouin
Chistian Boltanski, Photo : les habitants de l’hôtel de Saint Aignan en 1939 © Musée d'art et d'histoire du Judaïsme / photo Christophe Fouin
Photo du mémorial du Pont, Le mémorial du Pont  © les passeurs de mémoire
Photo du mémorial du Pont, Le mémorial du Pont © les passeurs de mémoire