1. Avant l'occupation

Que voit-on ?

Une rue de Paris, une marchande de quatre-saisons sur le trottoir, une boulangerie bien achalandée. La concierge, devant sa porte, discute avec un petit garçon qui habite peut-être dans le même immeuble. Une grande complicité émane du geste d’affection de la gardienne. Une voiture passe. Des personnes sont attablées à la terrasse d’un café. C’est l’été, des fenêtres sont ouvertes au premier étage d’un immeuble. On aperçoit un enfant et ses parents. Le père travaille sur une machine à coudre. Un petit chandelier à sept branches est posé sur un meuble, un poste de radio sur un autre.

Que sait-on ?

Avant la Seconde Guerre mondiale, une grande partie des Juifs qui vivent en France habitent en ville et en particulier à Paris. Un très grand nombre d’entre eux ont immigré de Pologne ou de Russie. En 1939, ils vivent dans des quartiers populaires (11e, 20e arrondissements par exemple).

Leurs enfants sont nés en France et scolarisés dans les écoles publiques, cela favorise leur naturalisation. Ces enfants vivent une vie ordinaire d’enfants. Leurs parents occupent des emplois modestes. Certains travaillent dans la confection, vendant leur production sur les marchés. Leurs appartements leur servent souvent d’ateliers. Le soir, on range la machine à coudre pour pouvoir déplier les lits-cages des enfants. Dans le faubourg Saint-Antoine (Paris 11e), où traditionnellement s’exercent les métiers du meuble, nombreux sont les ébénistes, tapissiers, vernisseurs juifs d’origine polonaise mais aussi turque ou grecque.

Le chandelier à sept branches ou Ménorah est un symbole du judaïsme. Il signale que la famille qui vit dans cet appartement est vraisemblablement d’origine juive, même si elle n’est pas nécessairement pratiquante. Les Juifs étrangers seront les premières victimes des persécutions antisémites du régime de Vichy.

2. L'Occupation

Que voit-on ?

Nous sommes dans le même quartier, la même rue. La scène se passe le matin. Une queue s’est formée devant la boulangerie. La gardienne de l’immeuble est sur le pas de la porte. Derrière la fenêtre du premier étage, le père observe sa femme et ses deux enfants qui sont dans la rue. La mère et le plus âgé de ses enfants (qui discutait avec la gardienne sur la précédente image) portent une étoile jaune, la petite fille n’en porte pas. Une voiture à gazogène passe. Un panneau indique la direction d’un «abri ».

Que sait-on ?

La scène se déroule en zone occupée pendant l’Occupation. Nous sommes en juin ou début juillet 1942 car le port de l’étoile jaune est devenu obligatoire, pour toute personne juive de plus de six ans, à partir du 6 juin 1942 dans la zone occupée. On suppose donc que la petite fille qui ne porte pas d’étoile a moins de six ans.

Le père semble être inquiet à la fenêtre, sans doute qu’il ne sort déjà plus, afin de ne pas prendre le risque d’être arrêté en pleine rue, les hommes jeunes étant, jusqu’en juillet 1942, les cibles des rafles (arrestations massives de personnes).

À partir de la rafle du Vél d’Hiv le 16 juillet 1942, les femmes, les enfants et les vieillards juifs sont également concernés par les arrestations.

La file d’attente devant la boulangerie suggère que les clients espèrent obtenir les quelques denrées disponibles en cette période de pénurie. Les Juifs, quant à eux, n’ont pas le droit de faire leurs courses aux mêmes heures que le reste de la population. Ils peuvent fréquenter les commerces à partir de 16 heures, lorsqu’il n’y a déjà presque plus rien à vendre.

Le panneau «abri » indique la direction d’un lieu en sous-sol où les civils peuvent s’abriter des bombardements.